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PAVAGE




Ma joue blottie contre ton corps, j'ai peur du temps et de l'espace. Aussi, dans ta chaleur, je me cramponne à un instant, à ta présence là : après, il n'y aurait plus rien.

Ton visage a changé — troublant, sacrificiel —, lorsque tu t'es laissé prendre et coucher, tout doucement. Jamais encore on n'aurait vu ce visage de toi. Dans tes yeux grands ouverts qui m'interrogent : « Te voici au seuil de moi : qu'allons-nous devenir maintenant tous les deux ? », au cœur de ta douceur déjà je sens l'instant qui viendra tout détruire, où un espace même infime ira séparer nos deux corps : entre nous deux soudain privés de la tendresse de la peau, ce quasi rien qui nous défait.


Mais, contre lui, nos âmes nues si parfaitement enlacées, aspirant à paver l'infinité de l'espace et du temps. Et moi, dans le refuge de tes bras, m'y endormant.